We meet again Mr Wendigo [Pv Noah]

Je marchais dans les ruelles de la ville. Cela faisait un moment que je n'avais pas eu une après-midi de libre pour ainsi me balader. J'avais alors troqué mes habits de travail, donc mon costume habituel, pour une chemise plus simple et un jeans pour être un peu plus détendu mais toujours bien habillé.
J'arpentais alors les rues de la ville, secondé mais également précédé de mes gardes du corps, ils étaient très importants que je me fasse accompagné. Car même si je n'avais pas de véritables ennemis, on ne savait jamais les risques qu'un vampire seul et "important" pouvait encourir en se baladant en ville ainsi.

J'arpentais les rues de Demon Heights, saluant certaines personnes au passage ou bien discutant un peu avec les gens qui venaient me parler. Je comprenais, ce n'était pas tous les jours que le PDG de la Harker Corporation se balade comme je le faisais actuellement.
Puis, en passant devant une boulangerie, j'eus une idée: prendre quelques pâtisseries que je déposerais à Aidan la prochaine fois qu'on se verrait, et je me doutais que cela ce n'était qu'une question de jour. Nous étions devenus plus que proches depuis la dernière fois et comme je pensais à lui à ce moment et à son amour de la gastronomie j'avais eu envie de lui faire plaisir.
Une fois la commande faite, je sortis et continuais ma petite balade avant de rentrer chez moi.

En passant dans une ruelle, je pouvais observer une légère agitation dans l'une  d'elle. Je m'y avançais et je pouvais voir une sorte de stand de musique où des jeunes invitaient des passants à essayer. Je m'approchais, mais en avançant... Je vis quelqu'un qui m'avait quelque peu marqué mais... Pas vraiment dans le bon sens.

Bonjour...

Surtout que je ne pensais pas le revoir...

Noah ne pensait plus à sa rencontre avec l'homme méfiant de la galerie artistique, pour sa part. Il avait d'autres considérations en tête. Son anniversaire approchait, et comme les tensions avec son père étaient de plus en plus violentes, sa mère s'était mise en tête de les raccomoder en leur rappelant qu'un jour, bientôt dans l'idéal, Noah allait se trouver une petite amie, se marier, et surtout leur faire de beaux petits-enfants ; et alors, le clan retrouverait l'harmonie qui lui manquait pour fonctionner correctement. Elle ne manquait pas de rappeler, de sa voix morne et plaintive, en se balançant lentement les yeux dans le vide, à quel point ses frères et soeurs étaient plus faciles et plus dociles ; et son père suggérait que son mauvais caractère était peut-être ce qui avait maintenu Noah en vie. Après tout, les mauvaises herbes sont toujours les plus vivaces.

Autant dire que l'ambiance à la maison était loin d'être au beau fixe. Mais le jeune homme avait une activité qui lui permettait de se défouler de toute cette frustration. Oh, ce n'était pas la drague, loin de là. Il n'avait pas de petite amie et n'en cherchait pas spécialement ; quant à avoir des enfants, il se jugeait trop jeune pour les éduquer, et se serait opposé avec horreur à ce que son propre père l'aide un peu trop dans cette tâche. Cependant, il prétendait qu'il avait quelques espoirs avec une imaginaire demoiselle qu'il avait créée de toutes pièces dans son esprit pour rassurer ses parents. Il lui arrivait de voir son père observer sa mère d'un air qu'il trouvait menaçant ; et il savait très bien que même à son âge, il était capable de prendre femme plus jeune en cas de veuvage imprévu, et d'engendrer une nouvelle descendance, préférable à la première génération. Et alors, lui non plus ne ferait pas long feu, il ne se faisait aucune illusion là-dessus.

Non, son occupation était bien plus innocente : il avait réuni, depuis le début de l'année scolaire, un groupe de jeunes élèves en décrochage scolaire, et les faisait travailler à s'en épuiser, tout en s'épuisant avec eux. Ils ressentaient son stress qui ressemblait au leur, ils appréciaient son humour noir qui leur correspondait tout à fait, et ils le considéraient comme un des leurs. En retour, il les autorisait à employer le type de créativité de leur choix. Et en l'occurrence, ils avaient monté un spectacle public, une comédie musicale faite de sketches, d'improvisations et de rap, qui exprimait leur ressenti par rapport à la guerre. C'était un spectacle énergique et lumineux, lucide sur les ombres qui menaçaient leur existence au quotidien, mais plein d'humour, et surtout, qui faisait sans cesse appel à la participation du public. Il s'agissait d'exorciser un pan pénible d'histoire locale, tous ensemble, en bons voisins. Et bien sûr, la simple chance de faire du bruit dans la rue avec l'autorisation de la mairie était déjà quelque chose qui ravissait ces gamins agités. Ils rayonnaient de joie. En les regardant travailler et se surpasser, Noah se sentait presque bien... Il oubliait presque qu'il faisait partie de ces menaces qu'ils évoquaient si lyriquement.

Soudain, il regarda une silhouette qui s'avançait dans la foule et croisa le regard du type de la galerie. Aussitôt, son visage se ferma, et il porta machinalement la main à sa mâchoire. Il s'était disputé avec son père de manière particulièrement féroce, ce soir-là. Il s'était fait casser une dent, qui lui faisait mal chaque fois qu'il se transformait à présent. Il aurait fallu se la faire arracher, mais il n'osait pas s'exposer au regard d'un dentiste, de peur qu'il remarque quelque chose d'anormal chez lui, sur une radio ou en l'examinant de près.

"Bonjour. Vous voulez participer au spectacle ? Il nous manque un wendigo pour la bataille."

Noah s'effaça sur le côté, pour montrer ses élèves qui se répartissaient rapidement en deux camps, en s'apostrophant de tirades rythmées et d'insultes colorées. L'un d'eux reconnut Harker et se mit à sauter sur place en l'exhortant à venir jouer avec eux.

Franchement je me demandais pourquoi le destin me faisait rencontrer à nouveau ce wendigo là. Mais alors que je ne faisais que passer et le saluer il me proposait alors de rejoindre les enfants pour une sorte de spectacle en pleine rue. Au début j'allais refuser poliment en montrer le paquet que j'avais acheté, mais c'est alors que l'un des enfants présent avec lui me reconnu et entraînait bien vite ses camarades à me supplier pour que je les rejoigne. Je soupire un instant mais déposait alors mes achats à un de mes  agents  de sécurité qui non loin au moindre soucis,pour mieux rejoindre la troupe des enfants. A croire que ma réputation pouvait se montrer quelque fois un peu pénible.
Pour ce soi disant spectacle,je devais jouer un wendigo. Cependant leur professeur,me vrai wendigo cette fois, devait jubiler que je prenne la place d'un "méchant" lui qui me voyait en fichu héros. Certes ce n'était plus ses mots exacts mais ça se rapprocher de sa vision de moi.

Je devais accepter... Mon image en partirait sûrement et je ne voulais pas prendre de risque inutile. Car si je faisais tâche je n'étais pas le seul à être touché. De la petite technicienne de surface au maire évidemment. Je rejoignais alors le côté des enfants que je devais rejoindre étant dans le rôle d'un wendigo. Je regardais ce cher Meyer, attendant qu'il m'explique ce qu'il attendait de moi. Étais ce une mini vengesse personnelle ou m'étais-je vraiment retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment ?

Des gens, m'ayant vu prendre part au spectacle s'était rameuté un peu plus autour de nous. C'était évident que c'était inhabituel de voir le PDG de la Harker Corporation se mêler de spectacle pour enfants.

Les enfants acclamèrent en voyant leur idole du moment les rejoindre sur la scène ; le public se rassemblait, et Noah engagea quelques autres adultes inconnus pour tenir des postes clés. Une demoiselle au style gothique prononcé se vit offrir le rôle du vampire : ténébreux et silencieux dans son coin, et elle en sembla ravie, quoique ce soit clairement le rôle le plus ennuyeux. Dans la bataille de mots, elle se contentait de siffler comme un chat, d'un air dédaigneux, et ne pouvait répondre aux pires affronts que par un seul mot savamment distillé. Puis Noah s’adressa à son invité de marque.

« C’est très facile de jouer un wendigo, vous avez de la chance. Il suffit de faire claquer vos crocs dès qu’une proie passe à votre portée. »

Les élèves s’amusaient comme des fous à s’approcher du grand personnage venu jouer avec eux, à le provoquer en le chatouillant du bout d’une petite branche ou d’une plume, et à sauter hors de portée dès qu’il les regardait. Ils étaient incontrôlables, mais ils dépensaient toute leur énergie en trop, négative surtout. Et chaque geste qu’ils accomplissaient serait le sujet d’un débat par la suite, qui leur permettrait à tous d’avancer. Noah gardait l’oeil sur eux, en restant un peu en retrait, puis il s’avança vers le wendigo improvisé. Il se campa en face de lui, bras croisés.

« Je joue le maire de la ville. Allez-y, ne vous gênez pas. Balancez-lui tout ce que vous en pensez. C’est mieux si vous arrivez à faire des rimes. Sinon, mes élèves s’en chargeront. »

Et oui, c’était une menace. Ils étaient des enfants après tout ; leurs rimes étaient loin d’être choisies dans un souci de rythme poétique. Ils sautaient sur toutes les possibilités pour dire des conneries et faire rire leurs camarades. Noah n’avait jamais été un tel enfant, dans son souvenir. Il n’avait jamais eu de camarades à proprement parler, c’était sans doute pour ça. A quoi bon les faire rire quand il savait qu’ils finiraient un jour dans son assiette, ou lui sur leur bûcher ?

Mon rôle était des plus simples. Je n'avais pas forcément de choses à faire ou à dire à part faire peur, comme il m'était demandé par le véritable wendigo. Je claquais des dents entre deux joutes verbales, qu'elles soient énoncées par moi ou par les autres comédie de cette comédie parlant du drame qu'à été la guerre qu'à subit cette ville. Je saluais néanmoins la volonté de faire participer ces jeunes générations à la réflexion vis à vis de cette guerre. Il semblait que ce jeune homme aimait bousculer, à sa manière, l'ordre établi.

Le spectacle amenait un peu plus de monde au fur et à mesure des minutes qui passaient. Tous type de citoyens passaient en nous regardant ou même s'arrêtaient pour nous écouter nous lancer des joutes verbales aux uns et aux autres. Les rimes et les arguments fusaient des deux côtés. Les enfants avaient vraiment l'air de s'amuser et je commençais également à bien aimer cette représentation.
Noah jouait également son rôle, enfin il jouait ce qu'il connaissait de Aidan. Le côtoyant la plupart du temps, je savais des choses sur lui que le wendigo ne savait pas donc par moment je ne trouvais pas son jeu juste, mais je me retenais de faire la moindre remarque.
Des journalistes venaient alors prendre des photos, et j'imaginais déjà les différents articles plus ou moins en ma faveur. J'avais des admirateurs mais aussi des opposants virulents... Mais à ce moment je m'en fichais, ce n'était qu'un spectacle. Malgré la situation passée, qui est représentée ici par de jeunes enfants n'ayant pas connus cette guerre, je ne pouvais m'empêcher de saluer ce choix du professeur, de vouloir faire réfléchir les jeunes. Bon au vu de son point de vue sur ces événements, ce n'était peut-être pas une bonne idée ... Mais j'avais tout de même participer à ça.

Cependant, vers la fin de la représentation, je sentais un regard pesant sur moi. Un regard froid que je réussis à capter et qui me provoqua un frisson dans le dos. C'était l'homme de la dernière fois, l'homme qui semblait avoir aussi effrayé le wendigo...
Je profitais justement d'une joute verbale d'un élève envers moi pour prétendre à fuir. Je me dissimulais derrière la scène, laissant le reste des comédiens poursuivre le spectacle.
Malgré tout je sentais toujours se regard sur moi. Il était là... Il était derrière moi, certes à une certaine distance mais il était tout de même là.

Je peux savoir ce que vous me voulez? Allez profitez du spectacle...